Billet 15 – 25 juin 2024 - Artistes contemporains et musées, une relation win-win
« win-win », c’est le terme qui a été employé par Julie Bawin de l’Université de Liège pour répondre à la question posée sur
l’instrumentalisation des artistes actuels par les institutions muséales.
Dans la continuité de notre intervention artistique au Château de Versailles avec la création de l’œuvre collaborative au nom de « Célébration », j'ai assisté à une table ronde sur le
rôle des artistes dans le cadre des rencontres « Musées citoyens » organisées les 21 et 22 juin dernier par l’institution. Grâce à des intervenantes de qualité, j’ai appris plein de
choses que je partage dans ce billet, tout en interrogeant.
L’intervention des artistes dans ces lieux de culture est assez récente, 40 ans au plus. Au départ, il s’agissait de les inviter pour choisir des œuvres dans les collections et de les faire
dialoguer avec leurs propres œuvres (The artist’s eye à la Nationale Gallery avec par exemple David Hocney en 1981). Dans les années 90, les cartes blanches se multiplient avec notamment
« L’artist show » au Moma. Depuis les raisons de capter du public se sont accrues, notamment stimuler l’imaginaire et faire exister de façon vivante les oeuvres.
Aujourd’hui, les modes opératoires varient. Certains artistes adoptent une forme de critique institutionnelle comme Fred Wilson le fit avec des installations subtiles et puissantes à la fois,
telles que ces menottes d’esclaves exposées au milieu de vaisselles en argent issue des colonies.
Et l’œuvre collaborative au musée ?
Est-ce un pas de plus vers la désacralisation des œuvres conservées ? Ariane Lemieux de l’Université Sorbonne Paris Nord témoigne du travail mené par Sonia Boyce à la Manchester Gallery
lorsque celle-ci interroge le public sur la question du corps de la femme dans la période victorienne. Elle décroche un tableau important « Hylas et les Nymphes » en proposant de le
remplacer par des Post-Its mis à disposition pour recueillir les réponses. Une démarche un peu trop pointue sans doute, les mots écrits par le public ont surtout réclamé le tableau
enlevé !
Hortense Belhôte, elle qui vient du spectacle vivant avec une solide culture sur l’art du XVII ème siècle, témoigne aussi. Elle a créé sa propre forme en s’appuyant sur la médiation avec des
conférences performances. A découvrir au Musée d'Orsay pour bousculer son regard sur certaines œuvres classiques.
Et nous, collectif d’artistes en arts plastiques, danse et théâtre, à quand la suite de nos projets dans les musées ? « Célébration » fut une étape réussie. En convoquant la
créativité par les yeux, le corps, la voix, nos arts mêlés font vivre la collection des médailles. La faire graver par le grand public pour une œuvre collective, c'est renouveler le regard en
utilisant aussi la main, le geste. Pourquoi pas le mouvement, la voix du public, pour faire bouger davantage encore…dans un esprit win-win !
Véronique Le Mouël
Avec Elodie Bergerault et Jezabel d’Alexis